Wang So.

(Attention, cet article contient des informations sur le contenu du drama. Si vous n’aimez pas que le contenu d’un programme que vous n’avez pas vu soit dévoilé, ne lisez pas plus loin…)

Il arrive, au cours des voyages dans les œuvres, qu’un personnage devienne plus qu’une description littéraire, ou une image sur un écran. Il se peut que ce personnage touche, pour une raison mystérieuse, votre cœur…
Un jour quelconque, je flânais sur youtube, à la recherche de vidéos à propos de Kang Ha-neul. J’étais dans ma première période de vif intérêt, voire de passion dévorante, pour les dramas coréens, et je m’intéressais à ce jeune et talentueux acteur, à la suite de « When The Camellia Blooms ».
Je suis tombée par hasard sur une remise de récompenses télévisuelles, où Ha-neul recevait un prix, et était félicité par un homme que je ne connaissais pas, très mince, de taille moyenne, aux oreilles décollées et au visage elfique, Lee Joon-gi. De prime abord, j’ai été gênée par je ne sais quoi. Un peu comme quand on est agacée par celui ou celle dont on va devenir complètement folle par la suite…
Kang Ha-neul ayant reçu une récompense pour l’interprétation de son personnage, je me suis donc intéressée à Wang Wook, le 8e prince, le rôle de Kang Ha-neul dans ce drama, Moon Lovers, Scarlet Heart: Ryeo, où il est à la fois magnifique et tellement juste.

Puis, j’ai fait la connaissance du 4e prince, Wang So…

Wang So est un loup. Wang So est vêtu de noir. Wang So tue son cheval dès les premiers moments du drama. Wang So est sauvage, violent, farouche. Wang So est dur et cruel. Il porte un masque qui lui couvre la moitié du visage. Wang So, c’est la rage et le désespoir. La première impression qu’on a du personnage, c’est sa fureur, sa violence, mais aussi, entre les lignes, sa solitude. Il est à l’écart de tout et de tous, de ses hommes, de ses frères, de son père, du palais, des gens et des animaux…
Ce personnage, dans les premières minutes du drama, est présenté comme un animal, un réprouvé, un monstre. Tout indique sa nature brutale, et sa différence. Bien qu’il soit prince, il est vêtu comme un homme du peuple, d’étoffes rugueuses. Le masque noir et gris, métallique, qui couvre la moitié de son visage, exprime sa nature âpre et sauvage. Il porte les cheveux longs, ce qui indique à la fois son âge : il est jeune, et sa position dans la hiérarchie parmi les princes : un paria.
Plus on avance dans le drama, plus ces aspects « physiques » changent… Ses coiffures s’élaborent, sont plus complexes, nouées, relevées, et ses vêtements deviennent plus colorés, plus sophistiqués, et plus adéquats avec son statut social, le plus élevé, celui de prince.

Wang So, c’est le balafré. La cicatrice, en Corée, semble ne pas avoir le même sens qu’en Occident. En Occident, la balafre du guerrier, c’est le témoignage de sa vaillance, et de son courage. Pour ce prince coréen, dont le corps doit être parfait, c’est une déchéance physique. C’est une honte et un crime. Immédiatement, cette cicatrice le place à côté et en dehors. Wang So porte également, avec cette cicatrice, la trace ineffaçable de ce qui a fait de sa vie ce qu’elle est, celle d’un enfant abandonné. Wang So a été mutilé par sa propre mère, lors du mariage du roi avec une seconde épouse. La jalousie de la Reine Yoo, sa rage, et aussi sa déchéance de femme, c’est Wang So qui les porte inscrites dans sa chair.
Wang So, un l’homme masqué qui cache toutes ses cicatrices, physiques et morales.

Wang So, c’est la souffrance d’un jeune homme qui se tourne vers la mère qui le déteste. Les mots de la mère, son mépris et sa haine, face à l’espérance du jeune prince, l’injustice de ce qu’il subit, bouleversent.
Pour sa mère, il n’est rien. De ses trois fils, deux seulement bénéficient de sa tendresse maternelle.
J’ai souffert deux fois, dans ces relations dysfonctionnelles entre la mère et son enfant. Pour l’enfant abandonné, méprisé, haï, et pour la mère. Quelle mère peut tellement être femme, et si éperdument ambitieuse, qu’elle en vient à persécuter son enfant innocent ? Sa froideur, son mépris, sa fureur se manifestent sans entraves et sans limites. Le roi, le père, est absent et inutile. Malgré son pouvoir, il ferme les yeux et abandonne son enfant à la cruauté de sa mère. Comme dans tous les cas de maltraitance infantile, il faut l’accord implicite des deux parents. Enfant maltraité, Wang So a une mère abusive, impitoyable et haineuse et un père lâche et calculateur.
La première chose qui m’a touchée, c’est la candeur persistante de ce jeune homme brutal en apparence, qui recherche désespérément ce qu’il n’a jamais connu, et qu’il n’aura jamais : l’amour inconditionnel d’une mère. Ce qui va être à l’origine de son destin en tant que personnage…
C’est l’innocence de ce désir originel, primordial, qui m’a émue de prime abord.
Le désespoir de cet enfant devenu un homme qui ne peut se résoudre au désamour manifeste de sa mère est douloureux.

Wang So, le 4e Prince.

Lorsque Wang So revient à la cour pour participer à un rituel censé éloigner les mauvais esprits, on comprend rapidement qu’il n’a pas l’intention de repartir d’où il vient, c’est-à-dire de là où sa mère l’a envoyé pour se débarrasser de lui, lui qui porte les stigmates de la déchéance de sa mère en tant que femme, de la fin de sa suprématie en tant que reine et de ses ambitions. Il a été repoussé, réduit en otage, encore tout enfant et fragile petit garçon. Il revient en guerrier brutal, invulnérable et froid.
Dès le second épisode du drama, les relations entre So et sa mère sont totalement explicites et consommées : abandon, dédain, froideur et mépris d’un côté, attente éperdue et désir de l’autre. Les marques de la haine et du rejet de sa mère iront crescendo au fur et à mesure du déroulement de l’histoire, malgré les efforts et les tentatives nombreuses de ce fils pour gagner l’amour de sa mère.
Abandonné et envoyé en tant qu’enfant de remplacement à une concubine qui venait de perdre le sien, So a vécu une enfance d’une barbarie et d’une cruauté sans bornes ; affamé, abandonné aux loups, battu, enfermé sans eau et sans nourriture, soumis à des tortures psychologiques et physiques, sans protection, sans aide, isolé et livré sans défense aux adultes, c’est un enfant qui a grandi dans la violence et la peur. De la douceur et de la tendresse, il ne connaît rien. Son cœur est fermé, et sa sensibilité est dissimulée sous une muraille qu’il porte à même le visage : son masque. Il vit dans un désespoir profondément enfoui, qu’il cache et protège par la dureté et l’agressivité d’un tempérament volontairement hostile et violent.
Pour So, dévoiler ses sentiments, c’est ouvrir des failles. Parce que, sous son armure de dureté et de force brutale, So cache sa nature profonde qui est celle d’un homme réservé et pudique, introverti, démuni sentimentalement, vivant dans la défiance.

Le thème de la confiance court tout au long du drama, comme un fil rouge. Wang So ne fait confiance à personne. Toujours sur la défensive, il n’est l’ami de personne, le frère de personne, le fils de personne. Progressivement, en calmant sa soif de tendresse, trois êtres trouveront le chemin de son cœur. Pourtant la première personne à laquelle il accorde sa confiance et à qui il s’abandonne totalement est aussi la première qui la trahira : Hae Soo.

Il ne s’agit pas ici de résumer le drama « Moon Lovers, Scarlet Heart : Ryeo« , ou de le commenter. Mais il est toutefois nécessaire, pour parler du personnage de Wang So, d’évoquer l’histoire racontée par ce drama, tout du moins son aspect totalement fictionnel. Si Wang So est bien un personnage historique, 4e fils du roi Taejo de Goryeo, fondateur du royaume de Goryeo et de cette dynastie qui s’achèvera en 1392, prince qui deviendra le quatrième roi de cette dynastie, et régnera 26 ans et épousera sa demi-sœur, le drama prend toutefois de nombreuses libertés par rapport à l’Histoire. Notamment sur le plan amoureux.
Il n’y a pas eu de Hae Soo…
Mais l’imagination et la fiction peuvent raconter une autre histoire…
En marge de l’Histoire avec un grand H, le drama narre l’histoire d’une jeune fille née au XXIe siècle qui se retrouve propulsée lors d’une éclipse dans le corps d’une jeune noble, Hae Soo, au Xe siècle, à la fin du règne de Taejo. Cette jeune fille de 16 ans, étrangère aux us et aux coutumes de l’époque, sème la perturbation au Palais. Sa nouvelle identité l’a propulsée dans la famille du 8e prince, Wang Wook, un des (très nombreux) demi-frères de Wang So. Le drama suit l’histoire de 8 des 26 princes engendrés par Taejo. Wang Wook est un prince érudit et calme, qui ne pose aucun souci. Progressivement Hae Soo comprend où elle se trouve, qui est le roi, qui sont les princes, malgré son peu de compétences historiques. Bien qu’elle soit tombée amoureuse du prince qui l’accueille, Wang Wook, elle se rapproche insensiblement de la figure sombre et mystérieuse, mais aussi étonnamment protectrice, du 4e prince, Wang So…
Le drama oscille souvent entre le destin de ces deux hommes, quatrième et huitième dans l’ordre de la naissance, rivaux en amour, et de fait, adversaires dans la lutte pour le pouvoir. Ils sont construits en opposition, opposition de destin, de relation à leur mère, de relation amoureuse, ce qui révèle en miroir la véritable nature de l’un, et de l’autre. So est un réprouvé, Wook est aimé. So est haï par sa mère, Wook est soutenu par la sienne. So est courageux et indomptable, Wook se soumet, et sans être vraiment lâche, renonce au combat par peur et par calcul. So est déterminé, Wook est hésitant et velléitaire. Aucune des promesses de Wook à Hae Soo ne sera suivie d’effet, par contre, Wang So prendra la défense de la jeune fille au risque de sa vie, et l’aimera jusqu’au désespoir.

Wang Wook, le 8e Prince (Kang Ha-neul)
Wang So ira jusqu’à la confrontation avec son père, le Roi, au risque de sa vie, tandis que Wang Wook renoncera et se détournera.

On ne peut pas vraiment parler de Wang So, sans parler de sa relation à celle qui change son destin, Hae Soo…

Hae Soo est interprétée par IU (Lee Ji-eun)

Le drama est globalement structuré en trois parties, un prologue et une conclusion : le prologue nous présente Hae Soo au XXIe siècle, ses déboires et son passage au Xe siècle. Une première partie de présentation, joyeuse, insouciante, narrant la rencontre avec Hae Soo, période dont la légèreté est troublée par la figure sombre de Wang So. La deuxième partie beaucoup plus dramatique, est consacrée aux luttes pour le pouvoir, impitoyables et sanglantes, et raconte également l’évolution des sentiments entre Hae Soo et Wang Soo, la naissance et le développement de leur amour. La troisième partie relate la lutte de Wang So en tant que roi, pour se maintenir au pouvoir, et le départ de Hae Soo du palais. La série se conclue sur un épilogue qui nous ramène au XXIe siècle.

La première rencontre de Hae Soo et de Wang So est légère et amusante. Wang So la sauve d’une chute dans la rivière, alors qu’il galope en pleine ville, semant la peur sur son passage. Il la prend en croupe, puis finit par la jeter à bas du cheval, comme un vulgaire sac de pommes de terre.
La seconde rencontre se place dans un bassin réservé au bain des princes, où seules les servantes habilitées peuvent pénétrer. C’est dans ce bassin qu’elle a fait sa première apparition à Goryeo, à un moment où sept des huit princes se trouvaient réunis.
C’est une scène particulièrement forte sur plusieurs aspects. So est demi-nu, son torse est couvert de cicatrices. Après avoir vérifié qu’il est seul, il retire son masque. Retirer son masque revient à abandonner ses défenses. C’est donc sans défense, vulnérable, qu’il entre dans l’eau laiteuse du bassin. Alors qu’il s’apprête à faire ses ablutions, Hae Soo surgit comme lors de sa première apparition, juste devant Wang So. Elle le regarde, le reconnaît, et découvre son visage, et sa cicatrice. So est effaré, puis il prend conscience qu’il n’a pas de masque et qu’elle peut voir la balafre qui barre son œil. Il porte sa main à son visage pour cacher la marque qui le défigure, avec un regard où se lit le désespoir et la peur, puis il retire sa main et change d’émotion pour devenir menaçant et dur. On comprend bien, dans cette scène, l’ambivalence des sentiments de So, et le personnage qu’il s’est construit. La fragilité et la vulnérabilité qu’il défend par la violence et l’agression. Cette seconde rencontre apporte des indices sur la véritable personnalité du 4e prince. Loin du loup sauvage, c’est un jeune homme qui souffre.

Plusieurs étapes significatives amènent So à considérer Hae Soo comme une alliée, et ainsi, à changer la vision qu’il a de lui-même. Détesté par sa mère, il se déteste. Traité de bête, il se croit bestial. Acculé à la violence, il se croit violent… Ce sont les mots de Hae Soo qui amène Wang So à une autre vision de lui-même. Hae Soo n’est pas de cette époque. Sa façon d’envisager les événements est très différente de celle d’une dame du Xe siècle. Elle n’en a ni les codes ni les règles. Ce discours neuf va changer la façon dont So se perçoit.
J’ai retenu deux phrases qui, pour moi, sont les phrases-clefs, prémices de l’évolution et de la libération de Wang So. Après le massacre qu’il commet pour dissimuler la trahison de sa mère, la Reine Yoo, qui rêve de mettre son fils Yo sur le trône, quel qu’en soit le prix, Wang So a définitivement acté le rejet de sa mère. Couvert encore du sang du massacre qu’il vient de commettre pour protéger celle-ci de l’accusation de haute trahison, en proie à la rage, il se rend dans le jardin où les dames du palais édifient des cairns, des tours de pierre, pour leurs enfants et commence à les détruire. « Les mères viennent pour construire ça ? » « Elles devraient prier pour moi ! »
Hae Soo tente de l’en empêcher et s’inquiète de ses blessures.
So la repousse et s’exclame plein d’amertume et de colère : « Je vous ai dit que j’ai tué des gens ! »…

Ce que répond Hae Soo à cette exclamation est tout sauf attendu. Plutôt que de le juger et de le condamner, ce qui serait la réponse normale, et celle qu’il attend, elle lui pose une simple question, mais une question qui change tout. Par ce questionnement, elle ouvre les voies de la rédemption, et de la guérison de l’âme torturée du jeune prince. « Alors, dites-moi pourquoi vous les avez tués… » Plutôt que de le renvoyer à la bestialité et à la violence, elle l’invite à l’introspection. Cette question n’est ni une excuse ni une explication, elle lui dit d’ailleurs qu’il ne sera pas pardonné. Mais en le mettant dans la perspective d’un enchaînement fatal de causalité dont il est une victime, et un coupable, elle lui permet de s’en libérer. Il ne s’agit pas d’une pulsion ni d’un instinct, ce n’est pas sa nature qui l’entraîne au meurtre.
Elle le confirme par une seconde question qui reste, elle aussi, sans réponse, puisque c’est l’ensemble du drama qui va y répondre : « L’avez-vous fait par plaisir ? »
Par ces deux questions, Hae Soo sort Wang So de son image d’assassin sanguinaire. Ce faisant, elle offre un abîme de questionnements et une nouvelle perspective à cette âme tourmentée.

J’ai dit qu’un des thèmes du drama était la confiance, confiance que Hae Soo refuse à So et qui sera une source de catastrophe… J’y reviendrai. On peut aussi noter le thème de l’abandon. Ils sont nombreux dans le drama : l’abandon de So par sa mère, l’abandon de Hae Soo par Wang Wook, l’abandon de So par Hae Soo, l’abandon de la concubine Oh par le roi… On notera aussi le thème récurrent de la survie qui revient également avec la phrase « vous avez dû tuer pour survivre », « Ce n’est pas un crime de vouloir survivre » qu’on peut également rapprocher de l’expérience de violence sanglante vécue par Wang Wook, enfant, qui a dû poignarder les assaillants de sa mère et de sa sœur pour les protéger et pour survivre…

Faire confiance, c’est risquer d’être abandonné.
Faire confiance, c’est mettre en danger sa survie.

Le thème de la confiance m’amène à la scène principale, le twist, qui change la nature du drama, à laquelle Yo, d’ailleurs, fera référence en accusant Hae Soo d’être à la source du cataclysme qui va dresser les frères les uns contre les autres, même si cette accusation occulte la culpabilité de la véritable responsable de ces drames: la Reine Yoo, et son ambition illimitée…
Chargé par le sort de mener le rituel de la pluie, dans le pays durement affecté par la sécheresse, Wang So est porté en procession par les rues de la capitale. Comme je l’ai dit plus haut, être marqué d’une cicatrice au visage est infamant, notamment pour le peuple qui considère cela comme une malédiction. Porter un masque est encore pire… Il est donc agressé par la foule qui l’humilie et lui jette des pierres, l’insultant sans vergogne et le traitant de monstre.
À la suite de cette humiliation publique, il renonce à être celui qui préside ce rituel.
Mais il reçoit une aide inattendue, celle de Hae Soo qui fut, dans son « passé », à l’époque contemporaine, cosmétologue, apte à fabriquer, à partir des éléments disponibles et des pigments trouvés sur place, un fard capable de masquer la marque honteuse. S’en suit une scène poignante où, face à cette femme, Wang So rend les armes et se livre à elle, lui accordant sa foi, et son amour : « maintenant, je suis à vous… » Hae Soo, pour la première fois, enlève le masque et touche ce visage. Avant de retirer son masque, qui est symboliquement sa défense et son armure, il lui demande s’il peut lui faire confiance. « Je suis celle qui a été trahie ». « Je ne changerai pas ! »…
Pourtant, c’est à la fin de cette journée que Hae Soo, en proie à des visions prémonitoires, doutera de lui, et lui retirera sa confiance, ce qui sera la source de toutes les morts et de tous les drames.
J’ai rapproché cette scène d’une scène qui intervient plus loin dans le drama, où Hae Soo commet une erreur fatale qui coûtera la vie à l’un des princes et à son épouse. Celle-ci lui demande pourquoi, si elle aime vraiment Wang So, elle ne peut lui accorder sa confiance. Cette question l’amène à voir et à accepter la nature profondément juste de So, mais il est trop tard, et ce manquement à la confiance qu’il devrait lui inspirer marque leur séparation.
Pourtant, au long du drama, les preuves de la fiabilité des sentiments et de la personnalité droite et noble de So ne cessent de s’enchaîner. Son sacrifice, lorsqu’il la sait en danger, sa protection, lorsqu’elle est seule et affaiblie, sa constance dans ses attitudes sans concession par rapport à la lutte pour le pouvoir qu’il rejette… Tout devrait lui dire qu’il n’est pas celui qu’elle craint qu’il soit. Elle confond la force de So et la violence.

« Moon Lovers, Scarlet Heart : Ryeo » est un drama qui finit mal. Les amants sont séparés pour toujours, les frères sont morts ou partis… Il ne reste que So, seul, isolé, et de nouveau, abandonné.
Cette fin déchirante, assez critiquée, est pourtant la fin naturelle, logique, qui permet de s’attacher aux personnages, et à l’histoire. Sans cette fin, Wang So ne serait pas cette figure désolée et poignante, debout dans l’immense cour vide de son palais, et le spectateur ne ressentirait pas cette pitié pour ce personnage imaginaire, certes, mais réel dans sa souffrance et sa solitude. Comme Roméo et Juliette ne finissent pas en gentils petits mari et femme, ce qui fait tout l’intérêt de la pièce de Shakespeare, Wang So perd Hae Soo, et perd tout, comme il l’annonce dans une réplique prémonitoire à sa demi-sœur : « Cette fille est tout pour moi. Sans elle, je ne suis rien… »

Pourquoi le personnage de Wang So m’a-t-il tellement touché pour qu’il soit, pour le moment, inoubliable ? Je pense que c’est à cause de la dualité de ce caractère. Mais c’est surtout la profonde tragédie d’une âme meurtrie, qui demeure fondamentalement prête à l’amour, prêt à se livrer à un amour sans calcul et sans arrière-pensées. Alors qu’il semble manipulateur et intrigant, il est véritablement, dans son essence profonde, candide et tendre. C’est ce à quoi il aspire, c’est ce qu’il cherche, et ce qui lui est refusé, même à la dernière minute. C’est quand il est trop tard que Hae Soo comprend la profondeur de la solitude et de l’amour dont elle a été l’objet. Ce que j’ai aimé, dans ce personnage, c’est sa dignité et sa loyauté. Sa majesté, qui est un sentiment intérieur, se développe au long du drama, et il finit par totalement l’incarner. Il est né « avec l’étoile d’un roi »… Sa majesté ne veut pas dire sa royauté, mais la puissance des sentiments nobles qui l’habitent.
Dès la scène du bain, on est pris de pitié pour cet homme marqué, malgré la répulsion qu’inspire sa violence. C’est un homme continuellement blessé, même par ceux qui l’aiment et qu’il aime, qui finissent par l’acculer au crime, à cause de leur défiance et leur suspicion. So va jusqu’au sacrifice de sa vie, jusqu’à mourir symboliquement pour vivre un amour total. Le jour où Hae Soo lui retire son masque et caresse la longue et fine cicatrice, et qu’il se remet entre ses mains, c’est d’un autre abandon dont il s’agit, mais un abandon dicté par la confiance. Il n’y a pas de chemin de retour, et d’ailleurs, lui-même le dit : « Je n’ai pas ces différents genres d’affection. Que ce soit l’amitié ou l’amour, pour moi, c’est pareil. C’est un tout ». Tout ne fait qu’un pour cet homme assoiffé d’amour.
L’amour qu’il recherche est semblable à l’amour dont sa mère l’a privé : un amour total et inconditionnel, et c’est un amour qu’il ne connaîtra jamais. Je crois que c’est ce constat qui fait que ce personnage a particulièrement parlé à mes émotions.

Bien sûr, il n’y aurait pas de 4e prince s’il n’y avait pas le magnifique Lee Joon-gi, qui offre à Wang So l’étendue et la complexité de ses sentiments. Il construit un personnage tout en émotions, mais également tout en retenue et imprime son jeu fiévreux et sa passion à son personnage. Évidemment, il y a la rage, la violence, la fureur. Il y a le cavalier splendide, il y a la capacité de cet acteur à mener à bien toutes les scènes de bataille avec une grande maestria. Il y a énormément (trop ?) de gros plans dans ce drama, qui exalte la beauté des acteurs, tous remarquables, mais ça tombe vraiment bien, parce que Lee Joon-gi joue avec tous les muscles de son visage. Même ses narines sont expressives. Il maîtrise chaque regard, et presque le chemin emprunté par ses larmes de déception et de souffrance devant l’indifférence et la cruauté de sa mère. Mais c’est son regard désespéré, dans le bassin de son bain solitaire où il est surpris par Hae Soo, et qu’il ne peut cacher sa balafre, qui me reste en tête. De l’ironie au désespoir, de la grâce au bonheur, il incarne un éventail de sentiments et d’émotion avec virtuosité. Il est, c’est vrai, servi par son visage à la beauté régulière et aux traits fins, mais au-delà de sa plastique, il sait réellement transmettre les émotions de son personnage, quelles qu’elles soient. Je pense sincèrement qu’il n’y aurait pas de Wang So sans Lee Joon-gi. Les deux s’interpénètrent, se mêlent pour ne faire qu’un, tellement l’incarnation est juste. Lee Joon-gi, c’est Wang So. Cet acteur passionné et intense donne vie et réalité à tous les personnages qu’il incarne, sans retenue et avec fougue, mais dans le cas de Wang So, on ne peut imaginer un autre interprète, tant il l’évoque avec feu et âme. Il nous permet de vibrer à l’unisson de So, de ses fêlures, de ses chagrins, de ses espoirs et de son désespoir. Il lui donne une réalité et une existence si forte, que j’ai l’impression d’avoir connu, dans une autre vie, une vie imaginaire, un homme, un prince, un roi, qui s’appelait Wang So.

Il reste en moi un peu de sa souffrance, qui ne sera jamais guérie.

Wang So (2017)


1 réflexion sur « Wang So. »

  1. Ah comme tu en parles bien de ce drama. Que j’ai vu grâce à toi d’ailleurs… Tellement d’intensité, de sentiments et de drames… J’aurai tant voulu que ça finisse bien mais on ressent au fil des images et du récit que c’est impossible et inexorable. J’ai adoré ce drama et je ne vais tarder à le regarder à nouveau. Quand au Prince Wang So, il m’a chamboulé, dés les premiers instants. Et J’ai découvert aussi Wang Wook. Des acteurs magnifiques. Avec comme tu le dis si bien tant d’intensité dans le jeu, dans les émotions pour Lee Joon-gi que je ne l’oublierai jamais!

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